Contexte général
L’identification des enjeux résulte de deux démarches, menées en collaboration avec les entités de l’ACV dont les politiques publiques impactent le territoire : le monitoring de la mise en œuvre du PDCn en vigueur ; ainsi qu’une analyse du contexte dans lequel la révision se déroule. Les préoccupations des entités de l’ACV ont donc été identifiées, puis traduites en enjeux.
Monitoring
Le suivi des mesures du PDCn permet de constater que, d’une manière générale, les objectifs fixés sont poursuivis. Cependant, le rythme de mise en œuvre des mesures est moins soutenu que prévu.
Localisation des habitantes et habitants
Les agglomérations et les centres accueillent désormais la majeure partie de la nouvelle population du canton. En 2018, près de 70% des nouvelles et nouveaux habitants choisissaient les agglomérations et les centres pour lieu de résidence, contre moins de 50% en 2008. Bien qu’importante, cette évolution ne permet pas encore d’atteindre l’objectif du PDCn : tendre vers trois quarts de la population vaudoise résidant dans les agglomérations et les centres.
Amélioration de l’accès aux transports publics
Le renforcement des transports publics, notamment dans les agglomérations, a permis une amélioration de l’accessibilité à une partie grandissante de la population et des emplois. Il faut également noter que le canton a su maintenir, voire développer, les lignes de train reliant les régions périphériques aux agglomérations et villes principales. Leur population peut ainsi accéder plus facilement aux services et équipements offerts et aux places de travail localisées dans les agglomérations et les centres.
Augmentation de la part de la population exposée aux nuisances
La concentration de la population dans les agglomérations et les centres semble avoir pour corollaire une augmentation du nombre de personnes exposées aux nuisances. Il s’agit notamment du rayonnement non ionisant et du bruit routier, dont le dépassement de la valeur limite d’immission affecte près d’un quart de la population. Par ailleurs, les niveaux de pollution atmosphérique observés sont également trop élevés, tant dans les agglomérations que dans les régions rurales.
Faible développement de la mobilité active
Le développement de la mobilité active a été faible durant cette dernière décennie, par rapport aux autres cantons comptant des agglomérations importantes. Par exemple, la part du vélo reste relativement modeste même si son utilisation a augmenté de manière significative en milieu urbain ces dernières années.
Diminution de la consommation énergétique
La consommation globale d’énergie diminue, malgré la croissance démographique observée. Après avoir connu une progression constante, la part d’énergie renouvelable semble stagner. Cette tendance nécessite d’entreprendre des actions pour accélérer la mise en œuvre de la politique énergétique cantonale.
Retard dans la valorisation des espaces naturels
La plupart des mesures visant la protection de la nature et de la biodiversité ont pris du retard. Par exemple, depuis 2008, la préservation des éléments qui constituent l’infrastructure écologique cantonale (anciennement réseau écologique cantonal) n’a que très peu progressé. Ainsi, elle ne peut pas assurer ses fonctions de mise en réseau et d’habitat naturel, cruciales pour enrayer la perte de la biodiversité.
Tendances
La révision du PDCn se déroule dans un contexte incertain. En effet, notre société vit des transformations qui influencent la qualité du cadre de vie et le bien-être de la population : globalisation, numérisation, changements climatiques, appauvrissement de la biodiversité, mutations de la structure des ménages et de leurs aspirations résidentielles. Ces transformations représentent des défis, non seulement pour l’organisation du territoire, mais aussi en termes de santé publique et de cohésion sociale.
Globalisation
Les interdépendances économiques, sociales, culturelles et environnementales n’ont cessé de se renforcer ces dernières décennies. La situation et la conjoncture internationales—ainsi que certains bouleversements récents—affectent notre société dans de multiples domaines.
Numérisation
La numérisation croissante a un impact fort sur le territoire et son organisation. Non seulement par les besoins en énergie et les infrastructures matérielles qu’elle nécessite (réseaux fixes et mobiles de très haut niveau ; centres de données, etc.), mais également parce qu’elle change le rapport de la population et des entreprises à l’espace : évolution des comportements en matière de production et de distribution des biens et des services ; besoins en surfaces et infrastructures logistiques ; développement du télétravail et du commerce en ligne, etc.
Changements climatiques
Les changements climatiques ont un effet direct sur le territoire : fonte des glaciers ; affaiblissement des différents services rendus par les forêts ; perte de la biodiversité ; phénomènes météorologiques extrêmes ; nouvelles maladies ; augmentation des canicules dans les villes ; sécheresse des territoires agricoles. Ces effets ont des conséquences directes sur la santé, l’environnement, la qualité de vie ou encore le paysage. Bien que le canton ne puisse pas, à lui seul, résoudre une problématique mondiale, il a un rôle important à jouer. Il partage en effet la responsabilité de contribuer activement à une politique climatique à la hauteur des enjeux et de ses moyens. Il doit accompagner, coordonner et veiller à la cohérence des actions à mener.
Appauvrissement de la biodiversité
Le rapport Biodiversité en Suisse : état et évolution, publié en 2017 par l’Office fédéral de l’environnement, montre que presque la moitié des milieux naturels étudiés sont menacés. Il en va de même pour plus du tiers des espèces animales et végétales. Le recul de la biodiversité est notamment dû à l’agriculture intensive ainsi qu’au morcellement des milieux naturels par les infrastructures et l’urbanisation.
Mutations de la structure des ménages et aspirations résidentielles
Les ménages constituent la cellule de base de notre société. Leur structure influence grandement les modes de vie et l’habitat. Le vieillissement de la population, les recompositions familiales et l’individualisation entraînent une diversification et une augmentation du nombre de ménages, dont les aspirations résidentielles ne sont pas toujours en adéquation avec le marché du logement. La structure du parc immobilier doit donc évoluer parallèlement à celle des ménages pour répondre aux attentes de la population.
Défis sanitaires
Les transformations sociodémographiques, climatiques et sociétales auront des répercussions sur l’état de santé et de bien-être des populations. Les qualités du cadre de vie—comme la présence d’espaces verts et d’infrastructures favorisant la mobilité active—influencent directement et indirectement la survenue et la gravité de maladies non transmissibles. L’accès aux prestations sociales et aux services de santé est encore trop souvent corrélé aux caractéristiques socio-économiques des populations et des territoires dans lesquels elles vivent. La préservation ou la création d’environnements favorables à la santé doit donc être une préoccupation commune qui sous-tend les politiques publiques impactant l’environnement et l’organisation du territoire.
Croissance démographique et création d’emplois
Le canton restera un territoire attractif et dynamique ces prochaines années. Selon le scénario moyen des perspectives cantonales de juin 2021, la population devrait atteindre 1 045 000 habitantes et habitants en 2050. Une personne sur deux sera active professionnellement sur le territoire cantonal. Cette proportion, stable depuis des décennies, contribue à la prospérité et au maintien de la cohésion sociale, piliers importants de la qualité du cadre de vie. Cela étant, la croissance démographique couplée au développement économique produisent une pression grandissante sur le territoire qui est limité.
Ressources vitales
S’étendant du massif du Jura aux Préalpes, en passant par le Plateau, le territoire cantonal est vaste et offre des paysages d’une grande qualité et diversité. Les reliefs, la géologie, la végétation, le climat ou encore les plans et cours d’eau influencent la localisation des activités humaines et sa relation à son environnement et façonnent ainsi l'occupation du territoire. Toutefois, la préservation des paysages et leur partage entre les fonctions naturelles et les usages anthropiques nécessitent de plus en plus d’arbitrages.
Lors de ces pesées d’intérêts, les ressources vitales, que sont l’air, l’eau, le sol et la biodiversité, qui forment le socle de notre cadre de vie, doivent être considérées, voire restaurées par chaque politique publique qui se déploie sur le territoire.
Sol et sous-sol
Composé d’éléments minéraux, d’humus, d’eau, d’air et d’organismes vivants, le sol est essentiel à notre existence. D’une part, il permet de produire des aliments et de filtrer les eaux souterraines. D’autre part, il contribue à préserver la biodiversité et à protéger le climat, notamment parce qu’il accumule du carbone organique et limite les impacts des changements climatiques. Toutefois, pour que le sol puisse assurer toutes ces fonctions, il doit être vivant et sain. Un sol rendu stérile met en effet des décennies, voire des siècles, à retrouver ses propriétés.
Le sous-sol géologique, qui est l’objet d’usages multiples, présente un potentiel en matière de séquestration carbone. Il constitue également un important réservoir de ressources naturelles. Cependant, ces dernières sont encore souvent considérées indépendamment les unes des autres.
Eau
L’eau est présente sous diverses formes : nappes phréatiques, lacs et cours d’eau, glaciers, pluie et neige. Pour la flore et la faune, elle est non seulement une ressource naturelle, mais aussi un milieu de vie. L’eau est à la base du fonctionnement des écosystèmes. Elle est également indispensable pour notre santé et la majorité des activités humaines. Cependant, les besoins en eau vont augmenter en raison des changements climatiques (sécheresses et canicules), tandis que la fonte des neiges, ainsi que des bouleversements importants du régime des précipitations sont à prévoir (saisonnalité, intensité avec risques d’inondation et périodes de sécheresse plus longues, etc.).
Le canton dispose d’importantes réserves en eau potable. Elles alimentent près de 2400 captages communaux d’intérêt public. Aujourd’hui, près de 60% de l’eau captée est distribuée sans traitement dans les communes. Cependant, les évolutions sociétales et économiques augmentent la pression sur cette ressource tandis que les changements climatiques modifient le régime des précipitations. Il est donc indispensable de mettre en place une gestion intégrée des eaux pour assurer de manière équilibrée les besoins économiques et sociétaux, sans compromettre la durabilité des écosystèmes.
Air
L’air est généralement associé à la troposphère, soit la couche de l’atmosphère la plus proche de la surface terrestre. Les principales sources de pollution de l’air sont la mobilité, notamment les véhicules individuels motorisés, les chauffages à combustion, et, dans une moindre mesure, l’industrie et l’agriculture. Toute diminution de la pollution atmosphérique permet de réduire les risques pour la santé et les écosystèmes. Une baisse de la pollution est généralement associée à une réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Biodiversité
La biodiversité désigne l’ensemble des êtres vivants et les écosystèmes dans lesquels ils vivent. La perte mondiale de biodiversité conduit à une augmentation des écosystèmes dégradés et au déclin de leurs services écosystémiques essentiels : régulation, notamment du climat ; qualité de l’eau et de l’air ; contrôle des ravageurs ; atténuation des intempéries ; pollinisation ; ou encore protection contre certains risques et maladies. Les causes les plus importantes du déclin de la biodiversité sont associées à des activités humaines : exploitation intensive des terres, des mers et de la nature ; changements climatiques ; pollution.
Parmi les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques, la Suisse présente l’une des plus fortes proportions d’espèces menacées. Les zones protégées s’avèrent insuffisantes, tant en surface qu’en qualité. Or, le déclin de la biodiversité ne se traduit pas seulement par des pertes irréversibles pour la flore et la faune ; il comporte aussi des risques pour le bien-être humain et l’économie. La biodiversité doit ainsi être considérée comme une ressource essentielle. Sa préservation et la réhabilitation de milieux dégradés génèrent des co-bénéfices qui réduisent les impacts sur d’autres ressources naturelles et participent à la préservation du climat.
Territoire
Le PDCn en vigueur est structuré selon trois armatures qui rassemblent les différents usages et fonctions du territoire : l’armature urbaine, l’armature écologique et celle des ressources.
Armature urbaine
L’armature urbaine est composée de l’ensemble des agglomérations, villes et villages, ainsi que de leurs aires d’influence. Irriguant de manière fine l’ensemble du territoire cantonal, l’armature urbaine comprend et structure tous les équipements et services de la vie quotidienne — logement, lieu de travail, commerce, culture, enseignement, sport — ainsi que les réseaux de transports qui les relient entre eux et aux territoires environnants. La tertiarisation et la numérisation croissante des activités accentuent la complémentarité entre les territoires ruraux et urbains.
Armature écologique
L’armature écologique se base sur les aires protégées et se ramifie jusqu’au cœur des espaces bâtis, au fil des cours d’eau par exemple. Elle s’oriente sur la sauvegarde des écosystèmes dynamiques que sont la faune et la flore. Elle vise avant tout à pérenniser la biodiversité, qu’elle soit ordinaire ou remarquable en : préservant des éléments existants ; restaurant des éléments dégradés ; les mettant en réseau. La protection de la faune et la flore ne s’arrêtant pas à la mise sous protection des milieux naturels, elle doit être une préoccupation constante dans toutes les fonctions et usages qui prennent place sur le territoire.
Armature des ressources
L’armature des ressources contient l’ensemble des surfaces productives (agriculture, sylviculture, vignobles, prairies, pâturages et élevages, vergers, etc.) et des surfaces qui fournissent des matières premières indigènes (sources et nappes phréatiques, carrières, gravières, forêt). La gestion durable de ces ressources vise leur exploitation à long terme, en maintenant un équilibre entre la maximisation des avantages pour la société et la minimisation des impacts environnementaux.
Sept enjeux pour le territoire
La révision complète du PDCn se base sur des enjeux clairement identifiés pour l’avenir du canton, afin d’élaborer un projet de territoire répondant aux évolutions sociétales et aux engagements pris.
Les enjeux ont été considérés de manière transversale. Ils se rapportent aux différentes politiques publiques et constituent le cadre de référence commun ainsi que le fil rouge de la révision.
Celle-ci s’inscrit dans l’objectif de créer un cadre de vie durable qui favorise la cohésion sociale et la prospérité, qui soutient la santé comme le bien-être, et qui préserve les intérêts des générations futures.
La démarche mise en place a permis de définir les sept enjeux suivants. Ils couvrent la majorité des politiques publiques qui ont des effets sur le territoire cantonal.